Habituellement sous l’influence de brises thermiques musclées, le plan d’eau de Porto était annoncé comme l’un des plus ventés du circuit 2012. Mais durant les trois premiers jours de régate, même si les huit équipages en lice ont pu profiter de bonnes conditions pour se départager (entre 6 et 9 nœuds), l’anémomètre n’était pas tout à fait fidèle à la réputation de la région. Il aura finalement fallu attendre l’ultime jour de course pour que la brise prévue tout au long de la semaine soit bel et bien de la partie. Hier, dimanche, la flotte des Extreme 40 a dû négocier un vent d’une quinzaine nœuds, avec des risées qui dépassaient les 20 nœuds : de quoi assurer un spectacle unique pour les spectateurs portugais présents le long du Douro et coller ainsi parfaitement à la philosophie du circuit. « 15 nœuds sur le plan d’eau intérieur de Porto, c’est comme si nous naviguions en extérieur avec 25 nœuds. Mais dans ce stade fermé nous ne subissons pas la mer qui est généralement associée à ce vent. Par contre, nous sommes entourés de digues et le stress est permanent car le cadre est étroit et fixe ! » nous confiait Pierre Pennec durant l’épreuve. Pour les équipages, les conditions de ce dernier jour de régate sont donc délicates et sur le plan d’eau étroit que propose ce Grand Prix, chaque croisement doit être millimétré, ce qui n’est pas si aisé avec de la brise. Autre ingrédient du jeu pour ajouter un peu de piment si besoin était : un fort courant s’inversant au cours de l’après-midi selon les marées.
Accrochage et abandon pour Groupe Edmond de Rothschild
Après deux manches moyennes, où ils se classent sixièmes, Pierre Pennec et ses quatre équipiers trouvent l’intervalle qu’ils recherchaient sur la ligne et s’offrent une victoire haut la main dans la troisième course du jour. A l’issue de cette première place, ils ne comptent plus que quatre points de retard sur Red Bull et se rapprochent de la deuxième marche du podium. Mais lors de la régate suivante, ils vont être stoppés net dans leur élan suite à une collision impliquant quatre autres bateaux. A son retour dans la Marina du Douro, Pierre Pennec revenait sur l’enchaînement qui avait conduit à cette situation et nous apportait sa version des faits: « Nous arrivions à la dernière marque de parcours de la manche 28. Nous étions bâbord engagé sur GAC Pindar qui était sous notre vent, lui même était engagé sur Zoulou. Oman Air arrivait en tribord mais pas très rapide. Nous avons abattu derrière lui. A ce moment là, The Wave Muscat vient de virer à environ quatre longueurs derrière Oman Air. Quand il nous voit Leigh McMillan tire la barre pour nous empêcher de passer. Groupe Edmond de Rothschild se retrouve alors quasiment parallèle à The Wave. Je demande de l’eau à GAC Pindar, qui lui même demande de l’eau à Zoulou mais ça ne répond pas. Je fais alors tout mon maximum mais je ne peux pas éviter le contact avec The Wave. Après le choc, je vois Bernard Labro allongé sur le filet et qui saignait au niveau du nez. Il était clair que la course était finie pour nous. Ce n’est qu’après que l’équipe technique nous a dit que de toute façon notre étrave bâbord avait été sérieusement endommagée. »
Lors de l’impact, le n°1 de Groupe Edmond de Rothschild, qui était en train de hisser le gennaker, a été propulsé vers la poutre avant du catamaran. Blessé et saignant au niveau du nez, Bernard Labro est alors très vite pris en charge par les médecins de la course et redirigé vers l’hôpital de Porto. Le Rochelais va bien, il rejoindra ses équipiers dans la soirée après des radios de contrôle. Il s’est sort avec un nez cassé et quelques ecchymoses sur le visage.
Sur les Extreme Sailing Series, la règle veut que les jugements se fassent directement sur l’eau. Pour cela, il y a en permanence des arbitres (les umpires) qui doivent en un temps très court prendre la décision de pénaliser ou non un bateau qui n’aurait pas respecter les règles de navigation à la voile. Ces arbitres ont décidé que Pierre Pennec et ses équipiers n’étaient pas dans leur droit ; une position que n’acceptait pas le skipper de Groupe Edmond de Rothschild : « Pour moi et pour notre coach présent, Benoit Briand, nous n’étions pas en tort et les arbitres ont commis une erreur de jugement ! GAC devait nous laisser de l’eau tout comme Zoulou devait en laisser à GAC. Ce qui modifie aussi la donne dans l’équation c’est le changement de trajectoire de The Wave. C’est pourquoi nous avons demandé au jury de rouvrir notre cas une fois rentré à terre, ce qui fut finalement accepté. Après la fin des manches, nous avons donc été donner notre version des faits au jury. Des représentants de GAC Pindar et Zoulou, présents à cette audience, ont confirmé que nous étions bien engagés sur eux. Par contre, Zoulou a indiqué qu’à cause de la proximité de la digue à cet endroit du parcours, il avait demandé très vite de l’eau car il n’avait plus de place pour abattre. Les différents équipiers ne semblent pas d’accord sur ce point et tout le nœud du problème est là. Le jury a donc considéré que nous étions fautifs car nous nous n’avions pas mis tout en œuvre pour éviter le contact.» Débouté par le jury international des Extreme Saling Series, le skipper de Groupe Edmond de Rothschild ne cachait pas son amertume hier face à cette situation qui lui rappelle malheureusement les déconvenues rencontrées par l’équipe l’an dernier lors du Grand Prix de Cowes : « Nous ne sommes pas contents de la décision prise par le jury et nous maintenons notre version. C’estdur, car cela fait deux fois que de notre point de vue cette instance commet des erreurs qui sont très lourdes de conséquences pour nous. Nous n’avons d’autre choix que de prendre note de leur décision, mais nous quittons Porto avec un goût amer. C’est extrêmement frustrant pour tout le monde de finir un événement comme ça. D’autant que nous avions, tout comme The Wave, demandé au comité de course que cette bouée soit déplacée. Elle nous semblait trop proche de la digue et dangereuse pour les croisements avec cette force de vent » expliquait Pierre Pennec.
Dans l’incapacité de disputer les cinq dernières manches de la compétition portugaise, Pierre Pennec et ses quatre équipiers limitent cependant les frais en se classant cinquièmes à Porto. Une place certes décevante pour les hommes du Gitana Team mais qui ne condamnent pas complètement les rêves de victoire de l’équipage au championnat annuel, comme le soulignait le skipper de Gitana Extreme: « C’est forcément décevant car ce résultat n’est absolument pas représentatif de la qualité de mon équipage ainsi que du superbe travail de notre équipe à terre (Sébastien, Hubert et Cyril), qui a dû finir tard à plusieurs reprises durant ce Grand Prix pour nous permettre d’être sur la ligne le lendemain. Mais il faut aller de l’avant ; il reste quatre Grands Prix à disputer et même si The Wave navigue vraiment très bien cette année, il n’est pas infaillible. J’ai confiance en nous pour rebondir très vite.»
Le prochain rendez-vous des Extreme Sailing Series se tiendra à Cardiff, au Pays de Galles, du 30 août au 2 septembre.
* En heure d’été, Porto est en GMT +1, soit une heure de moins qu’en France.
Classements
Classement du Grand Prix de Porto (après trente deux manches)
- The Wave Muscat – 198 points
- Red Bull Sailing Team – 183 points
- Oman Air – 156 points
- Alinghi – 145 points
- Groupe Edmond de Rothschild - 137 points
- SAP Extreme Sailing Team - 129 points
- GAC Pindar - 126 points
- Zoulou - 123 points
Classement provisoire des Extreme Sailing Series après quatre Grands Prix
- The Wave Muscat – 39 points
- Red Bull Sailing Team – 33 points
- Oman Air – 31 points
- Groupe Edmond de Rothschild - 31 points
- GAC Pindar - 22 points
- Alinghi – 18 points
- SAP Extreme Sailing Team - 18 points
- Zoulou - 16 points
L’équipage de Groupe Edmond de Rothschild
Pierre Pennec (Skipper / Barreur),
Arnaud Psarofaghis (régleur et chariot de Grand Voile),
Hervé Cunningham (régleur voiles d’avant),
Bernard Labro (N°1)
Romain Petit (régleur)
Benoit Briand (coach)
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