De l’avis de tous, l’étape de Lisbonne est un succès tant le plan d’eau atypique a su séduire les marins par sa beauté. En début d’après-midi, vingt-quatre heures après les Multi50, les monotypes de 70 pieds et le maxi-trimaran Prince de Bretagne embouquaient à leur tour le Tage, direction l’Irlande. Lors du parcours de dégagement, Spindrift Racing parvenait à tirer le meilleur du jeu de virements et d’empannages dicté par le courant et les oscillations nombreuses sur le fleuve. Mais l’équipage d’Edmond de Rothschild ne lâchait rien et lui emboîtait le pas à quelques longueurs. Un peu plus de deux heures après le départ, Yann Guichard et ses hommes empochaient le premier point de bonification du tracé au large de Cascais (le 2^e étant attribué au Fastnet, ndlr) suivi quarante secondes plus tard par Gitana XV !

Pour cette deuxième étape de large, Sébastien Josse a changé quelque peu sa feuille de match. En effet, comme prévu initialement, Antoine Koch remplace Olivier Douillard pour cette course vers Dublin. Navigateur d’Edmond de Rothschild l’an dernier, Antoine officie cette saison en tant que barreur – régleur mais pourra prêter main forte à Charles Caudrelier sur cette étape qui s’annonce tactique. Hier, tandis que l’équipage de Sébastien Josse remportait brillamment les in-shore de Lisbonne, Antoine était déjà penché sur l’échiquier atlantique : « Sur ce parcours, nous avons trois grandes zones météos. La première est celle avant la dépression, le long du Portugal et de l’Espagne. Puis vient la traversée ou le contournement de la dépression et enfin une dernière partie du Fastnet à Dublin qui est ce jour très incertaine mais qui sera probablement très ouverte au niveau de la stratégie » résumait Antoine, avant de détailler ces zones météorologiques :

Jusqu’à Finisterre
« Avant la dépression, qui nous attend dans le golfe de Gascogne, il y a une petite dorsale sur l’Espagne qui génère du beau temps comme nous avons depuis quelques jours à Lisbonne. Les prévisions de vent sont un peu plus faibles qu’hier pour les premières heures de course. C’est assez instable le long des côtes et il faudra jouer avec les phénomènes locaux. La dépression qui nous concerne est une dépression occluse, ce qui signifie qu’elle n’avance plus. Par contre, quand un tel cas se présente, généralement les fronts continuent eux à avancer un peu et à s’enrouler autour de la dépression. Au cours de notre première nuit de course, avant d’être vraiment sous l’influence de la dépression, nous allons croiser le premier front.»

Contournement par l’Est de la dépression
« Lundi matin nous devrions être à la latitude du cap Finisterre et là ça commencera à être dur. A partir de là, le vent va adonner et forcir très rapidement. Ce sera un changement d’ambiance assez franc et brutal car nous allons nous retrouver face à la mer. Cette dépression lève une houle qui est relativement importante : entre 2,5 et 3,5 mètres. Ce n’est pas énorme, mais puisque la dépression n’avance plus nous allons nous retrouver avec de la houle de Nord-Ouest et du vent de Sud. Nous serons alors au portant avec la mer de face … Le saut de vagues est garanti et ces conditions pourront être vraiment piégeuses. C’est une période où nous devrons faire attention car il sera facile de casser du matériel.  Selon les dernières prévisions, nous serons tribord amure au portant sous gennaker avec du vent qui va monter mais pas plus de 25 - 30 nœuds je pense. Par contre, on peut s’attendre à avoir des grains violents avec 40 nœuds devant les grains et 5 nœuds derrière. C’est tout à fait le genre de phénomènes locaux que l’on peut avoir près d’une dépression occluse. Il y aura 10h vraiment difficiles dans la mer et le vent fort. Il faudra à la fois préserver le bateau et les hommes et en même temps être dessus avec beaucoup de manœuvres, car celui qui sortira en tête de ce passage sera pas mal pour la suite. Il n’aura pas course gagnée pour autant. Ces 10h sont un passage critique de cette deuxième étape. Le but, pour avoir le meilleur angle possible après la dépression, est de tangenter au plus près de son centre mais sans y tomber car à cet endroit il n’y a pas de vent du tout. Au niveau météo, c’est un passage très délicat car il est difficile de positionner les centres de ces « dep » avec précision. A partir de 16h, ca commence à mollir mais tandis qu’hier nous étions sur un bord avant notre virement pour le Fastnet, aujourd’hui les prévisions sont un peu plus pessimistes et nous devrons certainement enchaîner les virements avant de changer d’amure.»

L’incertitude des 200 derniers milles
« La fin de parcours entre le sud Irlande et Dublin reste difficile à prédire. Pour l’heure, les modèles donnent un flux léger mais selon l’angle du vent nous pourrions tout de même aller vite sur ces derniers 200 milles.»

Ce midi, avant de larguer les amarres, le skipper d’Edmond de Rothschild estimait qu’une arrivée était envisageable mercredi prochain dans la matinée.

Classement de la Route des Princes (après l’in-shore de Lisbonne)

1. Musandam – Oman Air (Sidney Gavignet) / 54 points
2. Edmond de Rothschild (Sébastien Josse) / 52 points
3. Spindrift Racing (Yann Guichard) / 52 points
4. Virbac Paprec 70 (Jean-Pierre Dick) / 38 points

L’équipage d’Edmond de Rothschild sur l‘offshore 2 (Lisbonne – Dublin)

Sébastien Josse (skipper)
Charles Caudrelier / Thomas Rouxel / Antoine Koch / Jean-Christophe Mourniac / Florent Chastel