Dans l’histoire de l’architecture navale, les modifications et les optimisations sont légion, mais de là à rallonger de plus de 25% la longueur hors tout, il y avait un pas-de-géant technologique à franchir pour ne pas dénaturer la configuration générale de Gitana 11. Le trimaran avait prouvé en 2006 dans les mains de Lionel Lemonchois, qu’il était le plus adapté à ce parcours mariant des vents contraires, du petit temps et un final poussé par les alizés. Problématique différente en 2010 puisque la longueur d’un bateau est l’un des facteurs essentiels de la vitesse en relation avec sa surface de toile, son poids, sa puissance liée à sa largeur.
L’équation à résoudre…
Comme la taille n’est plus limitée, le choix de la longueur à partir de la plateforme originelle de Gitana 11 (ex-Belgacom construit en 2001) était contrainte par la volonté des concepteurs de ne pas modifier les bras de liaison, ni leur écartement :« 77 pieds ont été retenus parce qu’il ne fallait pas trop alourdir la structure pour conserver le comportement très réactif du trimaran. Comme il y a une limite au porte-à-faux, les nouveaux flotteurs ont été allongés de quatre mètres par l’avant et d’un mètre par l’arrière tandis que la coque centrale gagnait essentiellement de la longueur en greffant une étrave quatre mètres plus longue. Même si le plan de voilure n’a pas changé, la puissance était augmentée ce qui a imposé de renforcer le bras de liaison avant» explique William Fabulet, le boat capitaine du multicoque.
La problématique sur ce type d’opération chirurgicale était de ne pas toucher la partie structurelle centrale. Si les flotteurs ont été construits en Nouvelle-Zélande et le greffon de la coque centrale à Arcachon, toutes les autres modifications ont pu être réalisées par les spécialistes du composite du Gitana Team (Rolland Allanic, Hubert Corfmat, Marie Dixneuf, Daniel Le Digabel, Patrice Richardot), soit dix mois de chantier en 2009. Le cockpit a lui aussi été transformé à Saint-Philibert pour adapter Gitana 11 à ce nouveau format de la Route du Rhum.
« Le bateau a donc la même configuration générale avec de la longueur en plus. En termes de poids, Gitana 11 ne fait que 600 kg de plus avec la même surface de voile. Le bilan est très positif puisque le trimaran frise les 21-22 noeuds au près (contre 17-19 nœuds auparavant) et atteint facilement plus de 30 nœuds au portant. Le comportement à la mer est nettement amélioré, en particulier dans le passage des vagues. En fait, dans tous les secteurs, le bateau va plus vite en étant plus sain… Il reste toujours très réactif, donc aussi plus volage que ses concurrents à Saint-Malo : il est redoutable dans les petits airs et toujours très performant au portant ! » conclut le responsable technique du Gitana Team.