Le choix de la destination reste entier
24 heures après le démâtage de Gitana Eighty dans l'Océan Indien, les opérations de récupération du monocoque armé par le Baron Benjamin de Rothschild s'organisent. Parallèlement à ces aspects logistiques qui mobilisent les membres du Gitana Team, Loïck Peyron a lui organisé sa vie à bord. Depuis hier soir, il navigue sous gréement de fortune ; un espar mis en place après de longues et épuisantes heures de travail sur le pont.

Depuis les bureaux du Gitana Team, basés à Saint-Philibert dans le Morbihan, l'équipe technique multiplie les contacts afin de proposer un maximum de possibilités à leur skipper. Cet après-midi, après quelques échanges avec Loïck Peyron, plusieurs options demeurent valides et le choix final réclame encore quelques tergiversations.
Regagner l'Australie, pourtant distante de 2 700 milles, sous gréement de fortune reste d'actualité ; les vents poussant « naturellement » Gitana Eighty dans cette direction. Mais cette traversée de l'Océan Indien sous voilure réduite induirait une longue et pénible route pour le marin baulois. Autre cas de figure envisagé : affréter un navire pour rallier l'Afrique du Sud, Madagascar ou La Réunion. Parmi ces possibilités de remorquage en haute mer, une mérite quelques explications. En effet, un bateau se trouve actuellement sur zone, à proximité de Gitana Eighty : il s'agit du Marion Dufresne. Bâtiment de 120 mètres, ce navire basé à la Réunion et lancé en 1995 assure habituellement deux fonctions principales. Il effectue, en effet, des recherches océanographiques pour l'IPEV (Institut Polaire Français Paul Emile Victor) mais également des missions de logistique et de ravitaillement pour les terres australes françaises du Sud de l'Océan Indien. Croisant ce jeudi entre les îles Crozet et les îles Kerguelen, le Marion Dufresne pourrait donc rejoindre Loïck peyron et Gitana Eighty sur zone.

Face à ces choix multiples, le skipper et son équipe se laisse une nouvelle nuit de réflexion : « A la voile, je mettrais autant de temps pour rallier l'Afrique du Sud ou l'Australie. Par contre, différentes opérations de remorquage sont étudiées et pourraient changer la donne. Du coup, je vais faire route au Nord Nord-Est pour les prochaines heures afin de me laisser le choix de mettre le clignotant à gauche ou à droite. Nous bénéficierons de l'ensemble des éléments nécessaires pour prendre une décision demain » expliquait Loïck Peyron dans l'après-midi.

Retour en images sur un début de course presque parfait…

Dimanche 9 novembre dernier, à 13h02, sonnait l'heure du grand départ pour Loïck Peyron et les vingt-neuf autres concurrents du Vendée Globe. Cinq éditions après sa première participation, le skipper baulois avait à nouveau rendez-vous avec le tour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance. A la barre de Gitana Eighty, Loïck Peyron entrait en scène avec un plaisir non feint et une étiquette de grand favori qui n'avait pas de quoi déstabiliser l'expérimenté marin. Aux avant-postes dès le premier classement, le skipper du monocoque aux couleurs du Groupe LCF Rothschild assumait son statut de chef de file avec le panache attendu.

Des conditions météo de saison accompagnaient les premiers bords des solitaires et le Golfe de Gascogne frappait d'entrée la flotte au cœur en réduisant à néant les ambitions de plusieurs concurrents, dont Kito de Pavant, Marc Thiercelin ou encore Yannick Bestaven. Au près dans environ 35 nœuds de vent, Loïck Peyron se sortait parfaitement de ce premier piège se dressant sur sa route et prenait les commandes de la flotte deux jours après avoir quitté Les Sables d'Olonne. Le long des côtes de la péninsule ibérique, le chassé-croisé en tête du classement s'engageait alors que le monocoque armé par le Baron Benjamin de Rothschild passait Madère en tête et entamait la négociation du Pot-au-Noir avec une trentaine de milles d'avance sur ses poursuivants. La descente se jouait sur un rythme plus ou moins soutenu et sur les dix premiers jours de course, Gitana Eighty célébrait son sixième sous l'étiquette de leader.

Le 20 novembre, en ouvreur d'une flotte lâchée à ses trousses, Loïck Peyron était le premier à entrer dans la Zone de Convergence Inter-Tropicale et à en subir les affres en voyant sa vitesse chuter. Entré en tête dans le Pot au Noir, il était également le premier à en sortir et à franchir l'Equateur. Débutait alors un long bord de près, sur la bordure ouest de l'anticyclone de Sainte-Hélène, placé sous la suprématie de Loïck Peyron. Casse-tête attendu à l'échelle d'un tour du monde, ce phénomène était en cette saison particulièrement complexe et injuste car pénalisant les premiers et favorisant les poursuivants. Le skipper de Gitana Eighty subissait donc la difficulté de la situation météorologique et d'un anticyclone qui en s'installant confortablement, se mettait en travers de la route du Grand Sud et l'obligeait à adopter un chemin plus long que souhaité.  Loïck Peyron perdait alors la tête du classement à la défaveur d'un stop intempestif à l'arrière d'un gros grain, mais restait solidement installé dans le trio de tête.

Il fallait attendre le dernier jour du mois de novembre pour que sonne l'heure de la délivrance et se sortir des effets de Sainte-Hélène. Loïck Peyron fêtait alors ses 49 printemps dans des 40èmes rugissants qu'il n'avait pas fréquenté depuis 2001. Le Grand Sud était dans les étraves des solitaires qui mettaient le cap sur la porte des glaces Atlantique. Le 2 décembre, le lendemain de son anniversaire, le baulois devait se battre avec un gennaker enroulé autour de la quille de son monocoque et perdait un peu d'énergie mais ne concédait que peu de milles à la concurrence. Il annonçait alors qu'une ascension dans le mât s'avérerait nécessaire dès que possible. La course gardait cependant pleinement ses droits et les solitaires se lançaient dans une bataille effrénée d'empannages vers l'Océan Indien. Le 5 décembre, Loïck Peyron décidément impérial inaugurait le Nautic en reprenant les commandes de la flotte. Le lendemain, les portes de l'Océan Indien s'ouvraient à Gitana Eighty qui, s'il n'était plus le premier, était le monocoque le plus rapide de la flotte… Mardi, le solitaire retrouvait 100% du potentiel de sa monture après être monté dans le mât pour y récupérer sa drisse de gennaker. 24 heures plus tard, c'est ce même espar qui vient briser l'impressionnante suprématie du skipper du monocoque aux couleurs du Groupe LCF Rothschild.

Les contenus figurant sur ce site sont protégés par le droit d'auteur.
Toute reproduction et représentation sont strictements interdites.

Pour plus d'informations, consultez la rubrique mentions légales.
Saisissez au moins 4 caractères...