Ascension réussie à bord de Gitana Eighty
Il y a un mois, jour pour jour, les trente solitaires du Vendée Globe 2008-2009 s'élançaient des Sables d'Olonne. Aujourd'hui, et alors que la flotte ne compte plus que vingt-quatre prétendants, les premiers monocoques naviguent dans le grand Sud, en direction des îles Kerguelen, encore distantes de 900 milles à la mi-journée. A la faveur d'une transition favorable aux avant-postes, ce sont désormais six 60 pieds Imoca qui composent le groupe de tête. Parmi lesquels Loïck Peyron et Gitana Eighty qui occupaient toujours la quatrième place au classement de 16 heures, à 50 milles du leader.

A écouter les cartes postales des différents marins joins en vacation ce mardi 9 décembre, le « Pays de l'Ombre » - expression utilisée pour parler des mers du Sud - porte décidément bien son nom … Une idée confirmée par le skipper de Gitana Eighty : « Notre environnement est une immense nuance de gris ! Je n'ai pas vu le soleil depuis des jours et c'est vrai que cela manque un peu. Mais il faut prendre son mal en patience car c'est loin d'être fini.» A ce nuancier de couleurs viennent s'ajouter des températures dignes de vrais mois d'hiver. En effet, si les thermomètres diffèrent quelque peu d'un monocoque à l'autre selon leur positionnement sur le plan d'eau, aucun ne dépassait les 8°C pour l'air et les 5 °C pour l'eau. On comprend alors aisément que dans ces conditions les solitaires cherchent au maximum à profiter de la chaleur – toute relative – de leur habitacle et réduisent au strict minimum les sorties sur les ponts balayés par la mer.   

Lancés sur l'autoroute du Sud, les marins du Vendée Globe ont à composer sans cesse avec les successions de dépressions qui tournent sans discontinuer autour de l'Antarctique. Mais entre chaque front se glisse une zone de transition marquée par des vents moins forts. C'est ce phénomène que le groupe de tête a pu exploiter hier pour distancer ses poursuivants. En effet, tandis que les ouvreurs cravachaient encore aux alentours des 15 nœuds, derrière les solitaires se voyaient ralentis par une dorsale anticyclonique et l'on observait des vitesses plus proches des 10 nœuds. Mais se contenter de ces quelques lignes serait oublier que la météo peut reprendre aussi vite qu'elle donne … Actuellement, la tendance s'inverse et les hommes de tête goûtent aux conditions rencontrées hier par leurs adversaires. Ainsi au classement de l'après-midi la vitesse de croisière de Gitana Eighty chutait sensiblement, même si pour l'heure la baisse de régime semblait moins importante : « C'est notre tour ! Nous sommes face à des phénomènes d'alternance et après être parti par l'avant, cela revient par l'arrière. Il y en a pour tout le monde. Mais il ne faut pas trop gamberger là-dessus car ces yo-yo météos vont se reproduire » décrivait sereinement le skipper de Gitana Eighty. 

Pour l'heure, Loïck Peyron et ses adversaires les plus proches profitent d'un flux de Nord-Ouest modéré et mollissant et naviguent bâbord amures vers la prochaine marque de parcours : l'île Heard. Située dans le Sud-Est du plateau des Kerguelen, cette île inhabitée dépendant administrativement de l'Australie, devra être laissée à tribord par les solitaires conformément aux instructions de course. Dans la soirée, le vent devrait prendre un peu de gauche, ce qui signifie que les monocoques bénéficieront d'un flux de Sud-Ouest dans leurs voiles avant que ce vent ne retrouve un peu de vigueur.

Mais, à bord du monocoque armé par le Baron Benjamin de Rothschild, la bonne nouvelle du jour concerne la « grimpette » réussie de Loïck Peyron dans le mât …  Il y a une semaine, en effet, le solitaire nous signalait la rupture d'un lashing en tête de mât, le privant provisoirement de son gennaker. Bien que remédiable, la situation présentait néanmoins une contrainte : une montée dans l'espar de 29 mètres afin d'aller chercher l'élément coincé là-haut. N'ayant pas réalisé une telle opération en pleine mer depuis quelques années, le capitaine du navire souhaitait attendre des conditions de mer optimales. Après un essai ajourné en fin de semaine dernière, le ralentissement dans la dorsale cet après-midi semblait idéal pour une nouvelle tentative ! « J'ai gîté légèrement Gitana Eighty pour être plus stable et je me suis hissé à la force des bras, grâce à un système de bloqueurs sur des drisses. Ce sont des techniques empruntés aux montagnards. J'ai essayé d'être le moins vêtu possible, non seulement pour être léger mais également pour ne pas avoir trop chaud. Car c'est assez physique et fatiguant comme opération. Mais je suis vraiment ravi d'avoir pu profiter de cette petite accalmie pour le faire. C'est essentiel pour la suite ! » nous confiait le skipper de Gitana Eighty, transformé pour l'occasion en alpiniste. Cette ascension se soldant par une réussite, on peut dire que le monocoque aux couleurs du Groupe LCF Rothschild retrouve désormais 100 % de son potentiel ; une nouvelle qui venait ravir le marin baulois, prêt à lâcher les chevaux.

Classement du 9 décembre – 16 heures (heure française)
1. Paprec Virbac (Jean-Pierre Dick) à 16 300 milles de l'arrivée
2. Veolia Environnement (Roland Jourdain) à 30,7 milles du 1er
3. BT (Sébastien Josse) à 31,3 milles
4. Gitana Eighty (Loïck Peyron) à 50,4 milles
5. Ecover (Mike Golding) à 75,9 milles
6. Foncia (Michel Desjoyeaux) à 88,1 milles
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