Du bon usage de la bannette

Du vent, plus que prévu et c'est tant mieux. Il est monté progressivement dans les tours au fil de la journée, jusqu'à souffler un bon 35 nœuds en fin d'après-midi d'hier. Et là encore, à l'heure (8h00 TU) où je tape ces lignes en ce mardi matin, ce vent de secteur est sud-est continue à nous faire surfer sous la seule trinquette génois et la grand-voile à un ris. Cette accélération est due à un effet de site, tout à fait similaire à celui qui se produit au large du cap Finisterre, sauf que là, elle est due à une pointe de la côte chilienne située au sud de la ville de Tome. Dans la mâtinée, le vent devrait à nouveau faiblir, le grand gennaker retrouvera ses aises et nous poursuivrons notre route vers l'équateur en tirant des bords de largue pour rester dans le flux le plus puissant engendré par la bordure de l'anticyclone de Pâques. Voilà le programme des prochains jours. Avec 392 milles effectués sur le fond, mais seulement 350 milles réellement parcourus vers le but, ces dernières 24 heures seront, d'après nos météorologues (la triplette Lemonchois/Vittet/Mondon), assez représentatives des jours à venir, avec un passage de l'équateur prévu dans la journée de lundi prochain, soit le 19 février…

Ce retour de la navigation au portant signifie également que nous couchons à nouveau les « pieds devant ». Ceci mérite une petite explication. Si un jour vous avez la chance de dormir à bord d'un multicoque comme notre maxi catamaran, sachez qu'il convient de dormir dans le bon sens. Comme les arrêts brutaux dus aux  enfournements des étraves provoquent une très forte propulsion vers l'avant, il vaut mieux que ce soit les pieds et les jambes qui amortissent le choc sur la cloison plutôt que votre tête, avec toutes les fâcheuses conséquences qui pourraient en découler. Il peut y avoir cependant une exception. Lorsque vous naviguez au près serré dans la baston, le bon sens pour dormir n'est guère évident à choisir. La coque, surtout celle sous le vent, est perpétuellement soumise à de forts mouvements longitudinaux dus au passage dans les vagues. Une projection vers l'avant est immédiatement suivie d'une projection vers l'arrière, ceci dans un va et vient permanent où il serait de bon ton, un jour, de calculer le nombre de « G » que l'on subit ! Mais comme la force de propulsion l'emporte, il est conseillé pour une fois de dormir la « tête en avant ».

Pour en finir avec ce bon usage de la bannette, il convient d'ajouter que si vous voulez trouver le sommeil, il faut se détendre, faire corps avec sa couchette et faire une complète abstraction de ces mouvements longitudinaux mais également de ceux, tout aussi fréquents et violents, qui vous propulsent de bas en haut, de haut en bas.  Dans les magazines, à la rubrique Mieux Vivre, ils appellent ça  « lâcher prise ». Alors sur le pont, s'il n'en est pas question, dans notre bannette, nous sommes les rois du « lâcher prise ».

A demain

Nicolas Raynaud

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