Bien évidement, les jours que nous sommes entrain de vivre ne sont pas des plus faciles ! Notre cohésion, nous la devons à un objectif commun : aller le plus vite possible sur cette Route de l'Or. Hors là, depuis samedi matin, le temps s'est comme arrêté même si le chrono tourne inexorablement. Pas un d'entre nous n' y fait allusion, pas un pour décompter les jours perdus, pas un pour retourner le couteau dans la plaie, pas un pour se plaindre ou tirer « la gueule »…Alors que dans cette « inaction » les petites manies des uns et des autres pourraient vite prendre des proportions importantes, la vie du bord reste un long fleuve tranquille, chacun s'appliquant encore un peu plus à respecter les autres.
Ce temps « mort », les bricoleurs l'utilisent pour bricoler. Deux drosses de barre ont été confectionnées, les anciennes donnant de dangereux signes de fatigue. Une épissure par ci, une autre par là, un palan réalisé, des sangles recousues, des trappes ré étanchéifiés, un nettoyage en règle de la cuisine, tout cela ne saurait cependant faire passer tout ce temps. Alors, les livres sortent des sacs mais également les langues se délient. Si l'on se connaît tous pour avoir parfois navigué ensemble, pour s'être croisés maintes fois sur les pontons ou le long des comptoirs lors de compétition tels que les Grand Prix des Multicoques, ce n'est pas pour cela que l'on sait tout de l'autre, loin de là. Alors on se découvre un peu plus, racontant nos vies, nos expériences, majoritairement nautiques, avec forcément à la clef de nombreuses connaissances communes jusque là insoupçonnées. Ces discussions informelles, à deux, à trois ou à beaucoup plus, nous ne les aurions certainement pas eu si nous avions continué notre cavalcade. Et si cela s'appelle faire « contre mauvaise fortune bon cœur », il n'en est pas moins vrai que cette épreuve dans l'épreuve ne fait que renforcer notre esprit de groupe.
Alors patiemment, nous attendons le bon vouloir d'Eole pour reprendre notre marche en avant. Une possible fenêtre semble se dessiner dans la matinée de jeudi. Ne voulant pas que cela tourne à l'obsession, nous avons tous pris du recul avec celle-ci, sachant bien que Lionel et Dominic sauront déclencher à temps le retour aux affaires. En fait, c'est comme si nous étions à nouveau en stand-by, fin prêts à réagir au passage du feu vert. Sauf que là nous avons toujours un bateau à gérer, avec des quarts, des réglages de voilure, une route à suivre... Celle-ci va nous mener aujourd'hui dans le Détroit de Magellan. Pour y faire quoi ? Du tourisme tout simplement. Nous ne sommes pas que des mangeurs d'écoute…Ah j'oubliais. Pour renforcer encore un peu plus le moral des troupes, celles-ci ont eu le droit cette nuit à un cassoulet en boîte. Au saut du lit, il n'y a pas mieux et merci Loïck ( Peyron) d'avoir laissé à bord ces boîtes, toi qui ne part jamais en mer sans en amener quelques unes.
A demain
Nicolas Raynaud