Après un après-midi entier à naviguer à plus de trente nœuds de moyenne dans le golfe de Gascogne, les deux Gitana ont pu refaire une partie de leur retard mais Thierry Duprey du Vorsent et son équipage (Gitana 12) ont été contraints de s'arrêter en mer, le temps de changer un safran cassé dans la nuit. Les conditions météorologiques ont totalement changé cette nuit puisque les brises étaient faibles et portantes. Le flux d'alizés portugais s'installe progressivement ce jeudi matin par devant et les deux leaders reprennent de l'avance. Les écarts vont donc de nouveau augmenter mais là encore, ce ne sera que provisoire : les orages sont au rendez-vous dans le golfe de Cadix et un flux contraire d'Est fort est programmé pour la passage du détroit de Gibraltar. Une nouvelle compression de la flotte est donc logiquement attendue et il faudra ensuite préserver le matériel dans une mer très dure pendant de longues heures…
Thierry Duprey du Vorsent, skipper de Gitana 12 à 9h00 ce jeudi 11 mai :
« Léo (ndlr : Léopold Lucet) revient d'une petite promenade dans l'eau ! Il a changé le safran de flotteur tribord qui a cassé en début de nuit à ras de la mèche. Je ne pense pas que nous ayons touché quelque chose. Ce sont les safrans de l'ex-Bonduelle car nous n'avons pas encore installé les nouveaux safrans qui sont plus dimensionnés. Nous avions une pelle de secours à bord et donc il a fallu se mettre un peu à l'abri le long des côtes espagnoles pour que la mer soit plus plate et que Léo ne risque rien. Nous sommes devant Vigo… Depuis minuit, nous n'avons pas avancé et cela ne fait que deux heures que nous sommes repartis sous gennaker et grand voile haute dans une brise légère de Nord à 8-10 nœuds en route directe vers le cap Saint Vincent.
La journée d'hier a été incroyable ! Nous avons eu des sensations super en alignant des heures et des heures à 32-35 nœuds avec même des pointes à plus de 40 nœuds… Sous grand-voile et solent ou un ris et trinquette, pour finir d'un seul coup dans la pétole au large de l'Espagne, deux heures après le coucher du soleil : la nuit n'a pas été très « progressive ». Mais la bonne nouvelle est que Gitana 12 s'est magnifiquement comporté dans ces conditions musclées. Maintenant, il faut que nous recollions aux leaders. Cela devrait prendre un peu de temps mais au passage de Gibraltar, il y a de quoi se refaire avec les vents forts et contraires annoncés. »
Nicolas Raynaud à bord de Gitana 12 vers 21h00, hier soir :
« Cette descente du golfe de Gascogne va être à ranger dans la case "grand moment de navigation" indiscutablement, celle dont on a le droit de se souvenir… Au moment où j'écris ces lignes, Gitana 12 fonce à 33 noeuds, avec quelques jolies pointes vers les 37 nœuds ! C'est d'une très belle violence, mais la vitesse a forcément un prix. Les conditions de vie sont presque pires à l'intérieur qu'à l'extérieur ! Seul avantage : être au sec, sinon la coque vibre, rebondit, le tout dans un vrai vacarme où se mêlent le bruit des paquets de mer sur le pont, le grondement de l'eau au niveau du puits de dérive, le bruit caractéristique des coques qui percent les vagues, le défilement de l'eau sur la coque, etc… Trop de bruits à décrire ! Dehors, la lance à incendie est ouverte. A la barre, malgré une dose de stress bien légitime, le barreur a du mal à passer le relais tellement le plaisir est grand. On ne dira jamais assez que ces 60 pieds multicoques sont des engins fabuleux. Demain, nous enverrons des images ! »