Copyright : Rolex / Carlo Borlenghi / RORC
Un départ piégeur
Le Solent, l’étroit bras de mer qui sépare la côte anglaise de l’Ile de Wight, offre toujours une entame de course des plus belles. Mais il est aussi redouté par les marins du fait de ses courants, de son trafic maritime important et des nombreux bancs de sable qui sont autant d’écueils vers la sortie. En tête de flotte, l’équipage du Maxi Edmond de Rothschild a malheureusement fait les frais de son avance. Après le passage du phare de Hurst Point, les six marins ont vu leur géant s’arrêter sur un des ses fameux bancs non repérés sur les cartographies : « Nous avons touché un banc de sable qui n’était pas sur la carte. On contournait un gros banc répertorié mais on était assez loin. Après on sait qu’ils bougent pas mal ici et c’est toujours difficile de prévoir. Là on a manque un peu de réussite... C’était du gravier, la structure du bateau n’est pas touchée mais le bas de notre dérive ne doit pas être beau à voir, ça va nous handicaper en termes de vitesse par rapport à nos adversaires. Mais on continue et on va faire tout ce que l’on peut malgré tout. C’est dommage parce qu’on était bien sur ce départ ! Maintenant c’est des choses qui arrivent, Macif et Sodebo nous suivaient et ont pu adapter leur trajectoire » confiait Franck Cammas à Yann Riou, notre médiaman.
Se confronter, progresser
« La Rolex n’est pas l’objectif de notre saison sportive et son format est très différent de ce qui nous attend dans trois mois sur la Brest Atlantiques. Mais, non seulement c’est une très belle course à laquelle nous sommes toujours heureux de prendre part et surtout les confrontations ne sont pas nombreuses dans notre calendrier alors chacune d’entre elle est importante pour progresser ! » rappelait Charles Caudrelier, l’un des skippers du Maxi Edmond de Rothschild.« Après l’ArMen Race, c’est une nouvelle course qui devrait se jouer dans du petit temps, que l’on estime au moins à 50 % du parcours, et ces conditions ne sont pas les plus efficaces pour nous... L’ArMen nous a permis de bien travailler cela et de progresser je pense. Ce sera l’occasion de le confirmer. Pour le reste, chaque mille engrangé nous fait énormément progresser dans la connaissance du Maxi et dans son exploitation, en course c’est fois 2 ! Ce sera aussi la première fois que nous pourrons observer Sodebo dans du vent, ce qui devrait être intéressant.»
« Un vrai passage à niveau dans la transition »
La météo de cette 48e édition s’annonce contrastée avec des vents plutôt légers en Manche, lors de la première nuit, avant de retrouver un flux de Sud-Ouest à Ouest plus soutenu en Mer Celtique et sur la fin de course.
Quelques heures avant le départ, Franck Cammas nous dressait le scénario météorologique : « La situation est anticyclonique avec un vent qui soufflera d’Est pour le départ dans le Solent puis au cours des premières heures de course, ça ne sera pas très véloce. Il y a une dépression dans l’Ouest de l’Irlande qui nous affectera quand nous déborderons les Scilly, à la pointe sud-ouest de l’Angleterre. Le vent basculera alors au Sud puis à l’Ouest et se renforcera jusqu’au passage du Fastnet. Pour le moment, c’est là que les modèles voient le vent le plus fort, avec un bon 20 nœuds » annonçait le marin aixois, avant de nous détailler les conséquences de cette situation sur la course : « cette situation générale implique que nous devrons gérer une transition, pour passer du vent d’Est à celui de la dépression. Selon les dernières observations, il n’y a vraiment pas de vent dans cette transition. Elle est assez immobile et large, de la baie de Plymouth aux Scilly et la traverser peut être long... Ce sera un vrai passage à niveau avec des choix de route à anticiper. Le premier d’entre nous qui arrivera à passer de l’autre côté et à attraper le nouveau vent prendra une belle option.»
Temps de parcours
Le record de l’épreuve en multicoque, détenu depuis 2011 par Banque Populaire V en 1 jour 8 heures 48 minutes et 46 secondes à la faveur d’une météo ventée, va t-il tomber ? Au moment de s’élancer sur la 48e édition de la Rolex Fastnet Race, le skipper d’Edmond de Rothschild peinait encore à répondre à cette question : « Sur les routages, le temps du record reste accessible mais c’est assez mince comme chance... Il nous manque encore certaines informations pour se prononcer. Ça va être rapide, car la deuxième partie de course en Mer Celtique va être vraiment très rapide – nous devrions faire l’aller retour aux Scilly dans la journée de dimanche – mais l’inconnu reste vraiment la transition et le temps que nous mettrons à la négocier.»
Les Ultimes sont attendus à Plymouth au plus tôt dimanche soir, au terme des 650 milles nautiques du parcours et après avoir enroulé le mythique rocher du Fastnet au sud de l’Irlande.
Pour suivre la progression de la flotte de la Rolex Fastnet Race : https://www.rolexfastnetrace.com/2019-fleet-tracking-race-player
Équipage du Maxi Edmond de Rothschild
Franck Cammas / Charles Caudrelier – Skippers
David Boileau / Erwan Israël / Morgan Lagravière / Yann Riou
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Le saviez-vous ?
La Rolex Fastnet Race est une course biennale légendaire créée en 1925. Dans les années 60, Edmond de Rothschild, le père de Benjamin de Rothschild, affectionnait tout particulièrement les épreuves du RORC à la barre de ses monocoques. C’est grâce à l’un d’entre eux, Gitana IV, un magnifique Yawl en bois de 27 mètres, que le baron et ses hommes ont inscrit leurs noms au palmarès de l’épreuve qu’il considérait comme l’une des plus prestigieuses, la Fastnet Race. Nous sommes en 1965 et l’équipage s’offre dans le même temps le nouveau record de la course – 3 jours 9 heures 40 minutes – détenu par la suite durant dix-neuf ans.