Plongée entre deux mondes
Les cent-vingt trois solitaires de la Route du Rhum - Destination Guadeloupe vivent leur dernière journée de terrien avant le grand départ de demain, dimanche 4 novembre, à 14h au large de la Cité Corsaire. Ces derniers moments ont toujours une saveur particulière pour ces hommes et femmes qui s’apprêtent à s’élancer seul à travers l’Atlantique Nord pour plus de 3 500 milles de course. Et ce, qu’ils relient l’arc antillais en quelques semaines, pour les plus petites classes, ou quelques jours, comme le scénario semble se dessiner pour Sébastien Josse à bord du Maxi Edmond de Rothschild ; les prévisions météorologiques permettant de rêver d’un temps proche des 6 jours.

De terrien à marin

Depuis mardi, date de l’arrivée du Maxi Edmond de Rothschild à Saint-Malo, Sébastien Josse ne ménage pas son temps entre les briefings de l’organisateur, les réunions d’équipe pour préparer la météo et les nombreux rendez-vous médiatiques. Au milieu de toute cette agitation, le marin doit malgré tout parvenir à se préparer et à se concentrer pour la grande échéance qui l’attend. Un exercice auquel il est désormais parfaitement rompu. 

À quelques heures de s’élancer sur sa deuxième transatlantique en solitaire en multicoque, Sébastien se confiait sur son état d’esprit et ses ambitions :

« Bien sûr il y a du stress avant un tel départ mais il s’agit de bon stress ! On se pose forcément beaucoup de questions – comment va t-on réagir, comme les choses vont-elles se dérouler ? – car ce n’est jamais anodin de partir seul en bateau traverser l’Atlantique. La compétition nous pousse et nous permet de nous transcender mais l’exercice du solitaire est éprouvant physiquement et psychologiquement et en cela un peu contre nature. On aime bien quand la course démarre « tranquillement » et que l’on peut se mettre dans le bain mais quoiqu’il arrive le passage du statut de terrien à marin est brutal. En quelques heures, tu bascules d’un monde à l’autre. La première nuit en mer est l’une des plus tendues car on est dans un état de stress maximum. Dans quelques jours, je serai dans 35 nœuds avec 5 mètres de creux et là je serai dans ma réalité, face à mes responsabilités, avec mon sens marin et mon expérience pour gérer cela.

La navigation en multicoque, et encore plus en solitaire, est vraiment un exercice à part. Dès que le départ sera lancé je n’aurai pas le droit à l’erreur. Sur ces machines, très instables, il faut toujours être sur le qui-vive, on ne mange pas tranquille, on ne dort pas tranquille, on bascule très rapidement dans un état second car on est humain et vite fatigué ...

Quand je regarde derrière, tout ce que nous avons fait en quatre ans au sein du Gitana Team et là où nous en sommes aujourd’hui, au départ de cette course avec ce Maxi incroyable, c’est forcément beaucoup de fierté et une simple envie de dire merci ! Il est maintenant de ma responsabilité d’écrire la suite de l’histoire et je n’attends que ça. »

Point météo : des conditions rapides pour démancher et une grosse dépression

Membre de la cellule routage du Maxi Edmond de Rothschild, Olivier Douillard quitte Saint-Malo ce samedi pour rejoindre la QG technique de Gitana à Lorient où seront basés les quatre « messieurs » météo de l’équipe. Avant de partir, il nous dressait le tableau de départ et des premiers jours de cette Route du Rhum - Destination Guadeloupe.

« Les modèles sont entrain de se caler pour les deux premiers jours de course. Sur le départ il y aura du Sud Sud-Est, compris entre 15 et 20 nœuds. Ce sera très bien car ces conditions nous permettent d’être sur un seul bord, en bâbord, vers Fréhel puis vers la sortie de Manche et la pointe Bretagne. La flotte va s’élancer au reaching et ça ira très vite. Les bateaux de nouvelle génération comme le Maxi Edmond de Rothschild pourront peut-être même voler entre la pointe du Grouin et Fréhel ! Pour la suite, le contexte est toujours le même avec une première petite dépression à gérer dès la sortie de Manche pour les Ultimes. Les modèles se sont calés sur sa position et nous devrions passer dans son Sud afin de nous positionner pour la deuxième dépression qui est attendu mardi au large du Portugal. Ce midi, elle semble un peu moins forte que prévue même si elle reste très creuse et active. La difficulté sera l’état de la mer et il y aura des compromis à trouver par rapport à ce facteur. Le timing sera à ajuster une fois la première dépression passée, ce qui nous donne un peu de temps pour laisser le deuxième phénomène se caler et revoir alors nos choix de route si besoin.

Ce qui est aujourd’hui acquis est que cette édition 2018 va être très rapide ! Le départ est demain à 14h et dans la soirée les premiers Ultimes devraient déjà laisser Ouessant dans leur sillage. Sur nos routages ils seront à la latitude du Cap Finisterre lundi matin et aux Açores mardi... Nous avons encore des temps en moins de six jours à la tête à l’anglais même si nous avons un peu de difficulté à évaluer la capacité du Maxi Edmond de Rothschild à tenir les vitesses des routages dans la mer forte, d’où quelques incertitudes de timing. »

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