En file indienne plein Pot
Après six jours de course, les ouvreurs de la Route du Café négocient leur première traversée du Pot-au-Noir, la fameuse et redoutée zone de convergence intertropicale située à quelques degrés de latitude au Nord de l’équateur. En tête, le Maxi Banque Populaire XI a été le premier à y entrer cet après-midi mais aussi à en subir les effets avec un ralentissement marqué depuis quelques heures. Dans son sillage, en 2e position, Charles Caudrelier et Erwan Israël en profitent pour grappiller le moindre mille, parfaitement conscients que dans cette zone en mouvement permanent il faut à la fois être opportunistes et réactifs. D’autant que dans le tableau arrière du Maxi Edmond de Rothschild le reste de la flotte est à l’affût, à commencer par le duo Gabart / Laperche.
Maintenir la pression   

Partie du Havre dimanche dernier, la flotte des ULTIM, qui est actuellement la seule en course sur cette Transat Jacques Vabre, progresse ce samedi en direction de l’équateur avec au programme du jour le Pot-au-Noir à traverser.     

À la vacation ce samedi matin, Charles Caudrelier revenait brièvement sur les dernières heures de course qui viennent conclure une première semaine de mer intense, durant laquelle le géant aux cinq flèches a parcouru près de 3 000 milles, soit l’équivalent d’une transatlantique : « Oui c’est fatiguant, la course est fatigante et puis pour l’instant ça ne paye qu’aux riches… on a progressé dans l’axe d’Armel (sur Banque Populaire, ndlr) en faisant beaucoup d’empannages pendant que lui allait tout droit ! On a bien manœuvré ces dernières heures. Ça a été fort au niveau vent avec une mer désagréable, donc ce n’était pas facile de trouver le bon compromis entre le pilote et la barre car le pilote avait du mal à être performant et nous à la barre au bout d’un moment on fatigue. Nous avons eu quelques galères en plus donc nous n’avons pas pu aller très vite sur ce grand bord. Mais maintenant tout est rentré dans l’ordre donc il faut que le Pot-au-Noir nous aide un peu à nous rapprocher de Banque Populaire, qui fait une très belle trajectoire en première partie de course, pour pouvoir attaquer sur la fin du parcours où il y a deux sections assez intéressantes. Nous n’avons pas encore fait la moitié du parcours j’ai envie de dire. La route est longue !»   

Péage météo avant les latitudes Sud   

Tous les marins du tour du monde connaissent cette zone, passage obligé vers l’hémisphère Sud. Certains la redoute quand d’autres l’aborde avec fatalisme. Une chose est certaine, cette zone de convergence intertropicale, où se confrontent les masses d’air chaudes des alizés de Nord-Est d’un côté et de Sud-Est de l’autre, n’est jamais avare de surprises ; des bonnes comme des mauvaises !

Charles Caudrelier qui rappelait en avoir passé plus dans sa carrière que de Cap Horn se montrait plutôt volubile sur le sujet : « Aujourd’hui, le Pot-au-Noir a l’air plutôt facile. Je ne sais pas si c’est bien pour nous comme nous sommes derrière mais d’après les observations il n’y a pas beaucoup de dynamique dans les nuages. J’ai vécu des Pot-au-Noir bien pires que ça. Le passage du Pot-au-Noir peut être un passage tendu mais c’était surtout vrai à l’époque des ORMA ou des MOD70, car ce sont des bateaux qui supportaient mal d’être surtoilés, c’était chaud. Nous, on a un peu plus de marge. Le bateau est très grand, alors ça demande un peu plus de manœuvres mais il accepte mieux les surventes ce qui est rassurant. On a aussi maintenant de plus en plus de systèmes anti-chavirage et nous sommes routés donc notre cellule météo nous prévient des grains. Du coup le stress maintenant c’est plutôt de réduire la toile et de ne plus avoir assez de puissance. À chaque fois mon stress était plus de me faire doubler en restant arrêté… En 2021 d’ailleurs avec Franck sur cette même course nous étions arrivés avec une belle avance – 200 ou 300 milles – et Armel d’ailleurs était quasiment revenus à égalité de nous. Et c’est juste à la sortie que nous avions pu reconstruire notre avance de départ en sortant un tout petit peu plus tôt. Ici, ça se joue à rien parfois : un nuage, une ligne de grains.  Nos bateaux peuvent passer très vite le Pot-au-Noir, s’il reste un tout petit fond de vent on est très vite à 20 nœuds et on n’a pas les 300 milles un peu pénibles en une demi-journée. Mais on peut aussi prendre le double ou pire s’il n’y a pas de vent. En fonction de ton heure de passage ça peut être très différent. Ça bouge très vite dans ce coin-là de l’Est vers l’Ouest et c’est de la surveillance radar à bord et images satellite pour notre cellule routage.  Il n’y a pas de solutions miracles dans le Pot-au-Noir et malgré l’expérience aucune certitude. C’est une zone en mouvement, il faut savoir un peu lire entre les lignes de nuages.»   

À terre, ce passage mobilise l’ensemble de cellule météo du Gitana Team, composée cette année de Erwan Tabarly, Simon Fisher et Chris Bedford. Les hommes se relayent 24h/24 derrière les ordinateurs pour aider l’équipage du Maxi Edmond de Rothschild à dessiner la meilleure route possible. Depuis ce matin, ils ont les yeux rivés sur les prévisions mais aussi et surtout sur les images satellites pour ajuster sans cesse et en temps réel la trajectoire de sortie vers l’équateur et l’hémisphère Sud.     

Pointage du 4 novembre, 17 heures

1. Maxi Banque Populaire XI à 4 420 milles de l’arrivée

2. Maxi Edmond de Rothschild (Charles Caudrelier / Erwan Israël) + 57,3 milles

3. SVR – Lazartigue + 97,3 milles

4. Sodebo Ultim 3 + 186,7 milles

5. Actual Ultim 3 + 313,7 milles  

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